<<
Je
viens
trop
tôt,
dit-il
alors,
ce
n’est
pas
encore
mon
heure,
cet
évènement
formidable
est
encore
en
route et voyage, il n’est pas
encore
arrivé
jusqu’aux
oreilles des hommes… >>
Nietzsche
Dieu n’existe pas
L’Homme est une chimère
suivi de
prions pour que ça ne se sache pas !
il nous enterrera tous
Di-e.top
Didier Sribny
Toute
ressemblance
de
certains
passages
de
ce
texte
avec
la
récente
découverte
de
la
disparition
de
deux
carnets
manuscrits
de
Darwin
de
la
bibliothèque
universitaire
de
Cambridge
ne
saurait
être
que
fortuite.
*
*
Pour Nénette
DidierSribny.top
Di-e.top 1
«
Il
est
très
difficile
de
réaliser
ce
que
l’on
ne
comprend
pas,
et
c’est
très
souvent
un
problème
psychologique
parce
qu’on
a
l’habitude
de
penser
qu’on
peut
voir
des
choses
mais
en
fait
on
ne
peut
pas
les
voir.
Par
exemple
on
a
dans
notre
œil
un
point
aveugle
et
on
a
l’impression
que
malgré
ce
point
on
peut
tout
voir,
mais
en
fait
ce
point
ne
voit
rien.
On
doit
comprendre
ça
pour
réaliser
qu’il
y
a
beaucoup
de
choses
que
l’on
ne
peut
pas
voir.
Et
ce
n’est
pas
simple
c’est
une
difficulté
plutôt
psychologique,
et
après
il
y
a
une
difficulté
intellectuelle,
quand
on
peut
voir
qu’il
y
a
un
problème
on
doit
essayer
de
le
résoudre,
mais
pour
pouvoir
orienter
le
cerveau
sur
le
problème,
on
doit
voir qu’il y a un problème. »
Misha Gromov France Inter 30/12/2012
« Quand il se présente à la culture scientifique,
l’esprit n’est jamais jeune. Il est même très vieux,
car il a l’âge de ses préjugés. Accéder à la science,
c’est spirituellement rajeunir, c’est accepter une
mutation brusque qui doit contredire un passé. »
Gaston Bachelard
Les
germes
de
grandes
découvertes
flottent
constamment
autour
de
nous,
mais
ils
ne
prennent
racine
que
dans
des
esprits
bien
préparés à les recevoir.
Louis Pasteur
Di-e.top 2
DIEU EST MORT
Nietzche n’importe comment…
Dieu est mort…
Il y a des gens qui ne ratent pas une occasion de se taire.
Nietzsche, si vous voyez ce que je veux dire.
Friedrich
Nietzsche.
Nietzsche a dit : —
Dieu est mort.
Et moi, je dis : —
Dieu est vivant.
Je sais ce que je dis.
Pour preuve…
—
C'est
l'histoire
d'un
type
qui
sort
de
chez
lui.
Il
lance
à
sa
femme
:
«
Chérie,
je
descends
au
Marigny
chercher
mes
cigarettes
»
Le
Marigny
c’est
le
bar
tabac
en
bas
de
chez
lui.
Et
il
ajoute
:
«
Tu
peux
servir
la
soupe,
j'aime
pas
la
soupe
brûlante.
T'inquiète,
j'en
ai
pour
cinq
minutes.
Dix
au
plus,
promis juré. »
Le
type
sort,
et
lorsqu'il
rentre,
il
est
sale,
dépenaillé,
fatigué…
et il s’étonne de ne plus trouver son assiette sur la table.
On
essaie
de
lui
faire
entendre
qu’entre
le
moment
où
il
est
sorti
et
l’instant
où
il
est
rentré,
une
année
entière
s’était
écoulée.
Une année qui n’a laissé aucune trace dans sa mémoire.
L'histoire est authentique.
Hospitalisation.
Cure.
Sa
mémoire
revient,
petit
à
petit,
par
paliers,
et
puis
complètement,
enfin
presque.
Cependant
il
préfère garder ça caché.
DIEU N’EXISTE PAS
Vous
m'offrez
une
autre
bière,
et
je
vais
tout
vous
raconter.
Quelque
temps
avant
sa
disparition,
il
entend
à
la
radio,
une citation de Nietzsche, Friedrich Nietzsche : —
Dieu est
mort…
Ç’aurait
dû
lui
entrer
par
une
oreille
et
ressortir
par
l'autre.
Mais
voila
que
cette
phrase
s’est
mise
à
passer
en
boucle
dans
sa
tête.
—
Dieu
est
mort
c'est
Nietzsche
qui
l'a
dit. Ah sj c'est Nietzsche. ! Obsédant.
Dès
lors,
tous
les
soirs
au
Marigny
où
il
achetait
ses
cigarettes,
il
avait
pris
l’habitude
de
prendre
un
verre
ou
deux, histoire de se mettre les idées en place.
Le
soir
de
sa
disparition,
il
avait
un
peu
forcé
la
dose
il
faut
dire.
Il
était
sur
le
point
de
remonter
chez
lui,
il
avait
pris du retard, c’est là qu’il a un flash, une illumination —
comme
par
miracle,
mes
idées
étaient
devenues
très
claires.
Excessivement
claires.
C’était
on
ne
peut
plus
clean
dans
ma
tête
:
Dieu
ne
peut
pas
être
mort.
Je
dois
partir à sa recherche, il n'y a pas de temps à perdre.
Le
type
a
filé
à
la
gare,
disons
que
j’ai
filé
à
la
gare
parce
qu’en
fait
le
type
c’est
moi.
Il
y
avait
un
dernier
train
pour
la
capitale.
Pendant
le
trajet
j'ai
réfléchi
à
une
stratégie.
Comment
trouver Dieu, et où le chercher ?
Je bois une gorgée et je vous dis la suite.
Où
chercher
Dieu
?
Dans
les
églises,les
monastères
ou
autres
lieux
de
culte
?
Vous
êtes
Dieu,
une
supposition.
Vous-vous
savez
recherché,
poursuivi,
traqué,
iriez-vous
vous
cacher
là
où
tout
le
monde
vous
attend
au
tournant
?
Dieu est malin, vous voyez ce que je veux dire. C'est tout.
Où le chercher ? Et surtout, comment reconnaître Dieu ?
Une phrase de la Genèse me donnait une piste :
" Et Dieu
créa
l'homme
à
son
image
"
.
De
là
jà
en
déduire
que
l'homme
devait
primer
sur
l'image.
Il
ne
fallait
donc
pas
s’attendre à trouver un Dieu vieillard à barbe de père Noël
Di-e.top 3
drapé
de
blanc,
comme
celui
qu’on
voit
plus
ou
moins
allongé
sur
le
plafond
de
la
chapelle
Sixtine…
La
création
d'Adam.
Vous
voyez
le
tableau,
je
veux
dire
la
fresque,
le
moment
de
la
transmission
de
l'Esprit
de
vie
à
travers
un
geste
—
le
fameux
index,
l'index
du
Créateur
pointé
en
direction d'Adam.
J’étais
convaincu
que
Dieu
devait
avoir
l'apparence
d’un
homme
ordinaire
comme
vous
et
moi.
Restait
à
trouver
le
Bon
Homme.
Pas
le
bonhomme,
mais
le
Bon
Homme
avec
des
majuscules.
Vous-même
vous
pourriez
être
le
Bon
Homme… Vous souriez, mais allez savoir.
Une autre bière ? C'est pas de refus.
Restait
à
repérer
le
Bon
Homme.
Comme
je
ne
me
voyais
pas
aller
user
ma
santé
et
mes
escarpins
sur
je
ne
sais
quel
hypothétique
chemin
de
Damas
à
la
poursuite
de
Dieu,
j'ai
écouté
la
Sagesse
et
pris
le
parti
d'attendre
qu'il
se
présente
à
moi.
Et
quoi
de
mieux
adapté
pour
ce
faire
que
les
bars,
les
bistrots.
Je
pouvais
y
planquer,
me
mettre
en embuscade sans attirer l’œil.
Ç’allait
devenir
un
travail
à
plein
temps,
―
la
"
Total
Immersion
".
J'ai
dû
me
faire
alcoolo
pour
accéder
au
statut
d’authentique
pilier
de
bistro
grâce
à
quoi
je
pouvais
me
fondre
dans
le
décor.
Si
bien
que
le
jour
où
j'ai
entendu
répondre
à
quelqu’un
qui
cherchait
les
toilettes
:
«
Vous
passez
devant
le
bar.
Vous
tournez
tout
de
suite
à
droite
après
le
pilier…
»
et
que
le
pilier
c’était
moi,
j'ai
su
que
le
plus
dur
était
fait,
je
faisais
partie
des
meubles.
J’étais
opérationnel,
il
ne
me
restait
plus
qu'à
attendre,
attendre,
et
attendre. Jour après jour.
Tel
un
sous
marin,
entre
deux
eaux
(une
façon
de
parler)
les
sens
toujours
en
éveil,
mais
sans
ostentation
pour
ne
pas
susciter
les
soupçons,
j’allais
attendre
que
Dieu
veuille
bien se manifester.
Di-e.top 4
Et
puis
un
jour,
c'était
une
fin
de
nuit,
sur
le
zinc,
je
sirotais
un
demi
de
déménageurs
(une
bière-Calva)
pour
essayer
de
neutraliser
mes
gueules
de
bois
des
jours
précédents...
A
l'extrémité
du
comptoir,
derrière
un
verre
de
bière,
bonnet
noir
à
raz
les
sourcils,
lunettes
façon
écaille,
nez
informe,
petite
bouche
telle
une
cicatrice
rosâtre,
portant
parka
noire
ouverte
sur
un
tee-shirt
gris,
écharpe
grise
pendant
de
chaque
côté
du
cou,
était
un
homme
pour
le
moins avachi.
Et
puis
il
y
avait
Albert,
le
garçon,
qui
donnait
rageusement
des
coups
de
balai
pour
pousser
papiers
et
mégots
qui
jonchaient
le
sol,
Albert
qui,
arrivé
à
la
hauteur
de
l’homme
avachi,
s’exclame
:
«
Pousse
un
peu
tes
cannes
putain
oh
!
Tu
les
pousses
ou
quoi
putain
de
Dieu
!
Bordel
de
putain
de Dieu ! Si c’est pas Dieu possible ! »
Ce cri du cœur me fit sortir de mon artistique torpeur.
Malgré les coups de butoirs d'Albert, l'homme ne bronche
pas. Tout juste tourne-t-il son regard vers le pilier, lui fait un
clin d'œil en lui lançant un discret :
« N'importe comment fiston... »
C’était un « N'importe comment fiston… » accompagné
d’un superbe geste — un mouvement de va et vient du
majeur de la main droite.
Moi, j'étais censé être un pilier, et l'homme au bonnet noir
m'avait démasqué !
Et il y avait Albert, le garçon qui insistait : « Tu les
pousses tes cannes oh ! »
Il y a le barman qui sermonne mollement Albert, lui
demandant de ne pas trop bousculer la clientèle…
Et
Albert
qui
se
rebiffe
:
«
Oh
putain
!
Je
ne
vais
tout
de
même
pas
me
mettre
à
genoux
devant
lui
putain
oh
!
Vous
voulez
pas
que
je
lui
lave
les
pieds
en
plus,
au
bonhomme,
oh ! »
Di-e.top 5
Le Bon Homme ! C’est alors que, sortant de mon rôle de
pilier, je suis intervenu gentiment auprès d'Albert :
–– On ne t'en demande pas tant Albert, il suffit souvent
de demander les choses poliment pour être exaucé.
Je fais quelques pas vers l'homme avachi et lui dis :
––
Sans
vous
commander,
auriez-vous
l'amabilité
de
pousser
vos
pieds
un
instant
?
Afin
qu'Albert
puisse
finir
de
balayer,
je
vous
prie
en
insistant
bien
sûr
—
je
vous
prie ― et en me fendant d’un discret clin d'œil.
L’homme obtempéra en grommelant.
Et le barman de dire : « Et bien tu vois Albert, tout est dans
la manière j'vais t'dire ! Il s'est pas fait prier j’vais t’dire. »
J'avais enfin mis la main sur le Bon Homme.
Derrière l’homme avachi se cachait Dieu ; derrière le pilier
de bistro moi. Je ne lui ai pas dit que je l’avais confondu, de
toute façon lui le savait, il n’était pas Dieu pour rien. Et puis
n'était-ce pas lui qui m'avait confondu en premier ?
Je m’installe à ses côtés. Nous discutons à bâtons
rompus, comme je vous parle en ce moment.
J'aurais
pu
m’attendre
à
ce
qu’il
ressasse
des
“
En
vérité
je
vous
le
dis
”
en
préambule
à
de
divines
Élucubrations.
Non
!
Son
préambule
était
«
N'importe
comment
fiston…
»
suivi
du
geste.
Geste
simple
et
poétique,
majestueux
et
définitif
de
la
main
et
du
majeur
et
qui voulait tout dire. Le Doigt de Dieu.
J’en
profite
pour
le
questionner
sur
les
sujets
des
plus
divers…
La
vie,
la
mort,
le
paradis,
l'enfer,
le
sexe
des
anges,
la
politique,
le
Pourquoi,
le
Comment…
Il
a
réponse
à
tout
:
«
N’importe
comment
fiston…
»
suivi
du
Geste,
sans
plus.
Et
tout
devenait
lumineux.
Il
n’avait
pas
besoin
de s’étendre.
J'ai
voulu
aborder
le
sujet
de
Nietzsche.
Sa
réaction
fut
sans
ambiguïté
:
«
N’importe
comment
fiston…
»
voulant
dire
par-là
qu'il
ne
faut
pas
prêter
attention
aux
Di-e.top 6
élucubrations
d'un
pauvre
ivrogne,
quand
bien
même
il
s'appellerait Nietzsche.
À
un
moment
je
le
prie
de
m'excuser,
il
fallait
que
j'aille
pisser. Il me dit :
« N'importe comment fiston... »
Je vais pisser ; quand je reviens, Dieu avait disparu.
J'avais enfin rencontré Dieu. Dieu était vivant, en parfaite
santé,
et
Nietzsche,
le
pochetron,
était
discrédité
à
tout
jamais. Paix à son âme.
J’ai
décidé
d'arrêter
l'alcool
en
douceur,
sur
un
dernier
demi
de
déménageurs.
Il
est,
dit-on,
dangereux
d’arrêter
brutalement
la
boisson.
Il
faut
y
aller
par
paliers.
«
Double
le Calva s’il te plait ! »
Il fallait bien ça pour porter un ultime
toast
en
l’honneur
de
Dieu.
J’ai
régularisé
mon
ardoise,
payé
la
note
de
Dieu…
Vin
Dieu
!
Enfin
je
le
lui
avais
promis...
Et
puis
bon,
je
lui
devais
bien
cela.
J’avais
trouvé
mon
chemin
de
Damas.
J'allais
pouvoir
enterrer
ma
vie
de
pilier
de
bar.
Ma
"
Total
Immersion
"
allait
prendre
fin,
il
ne
me
restait
plus
qu’à
refaire
surface
tout
en
respectant
des
paliers
de
décompression.
Je
me
suis
résolu
à
prendre
un
double
calva
pour
la
route
«
sans
bière
s’il
te
plait »
pour
respecter
les
paliers...
Et
puis
plus
rien.
Ma
mémoire
s’arrête là.
Comment suis-je rentré au bercail ? Le trou.
Je
sais
que
je
me
suis
retrouvé
devant
le
Marigny.
Il
était
fermé.
Je
sais
que
j'ai
poussé
jusqu'au
Brazza.
Je
sais
que
j'ai
acheté
un
paquet
de
cigarettes
et
je
sais
très
bien
qu’il
y
la
la
soupe
qui
m'attend,
que
je
n'aime
pas
brûlante,
mais
quand
même
pas
froide.
Je
me
vois
remontant
chez
moi,
et
découvrir que mon assiette n'est plus sur la table...
Au
début,
à
l'hosto,
alors
que
la
mémoire
repoussait
lentement,
palier
après
palier,
je
réussissais
à
obtenir
le
contact
avec
Dieu.
Je
pouvais
l'interroger,
il
me
répondait
dans
l'instant,
J'avais
droit
à
son
:
«
N'importe
comment
fiston... »
Il avait toujours réponse à tout.
Di-e.top 7
Et
puis,
plus
j'avançais
dans
les
paliers,
plus
Dieu
se
faisait
rare.
Une
fois
j'ai
réussi
à
lui
demander
pourquoi
j'avais
tant
de
mal
à
le
joindre,
il
m'a
répondu
:
«
N'importe
comment
fiston...
»
Je
lui
demande
ce
qu'il
entendait
par
là… Je n’ai pas eu de réponse… Depuis silence radio.
J’ai
quitté
l’hosto.
Tout
est
rentré
dans
l'ordre.
Dieu
était
vivant.
Bien
vivant.
La
vie
pouvait
reprendre
son
cours.
Dieu nous enterrera tous, faut être honnête.
C’est
au
bout
de
quelques
semaines,
que
je
me
suis
mis
à
gamberger.
Que
cachait
ce
silence
radio
?
Et
puis
la
phrase
de
Nietzsche
m'était
revenue.
Et
si
malgré
tout
les
poivrots
avaient,
comme
on
dit,
un
sixième
sens.
Et
puis
tout
cela
à
commencé
à
passer
en
boucle
dans
ma
tête…
Obsédant !
Pas
plus
tard
que
tout
à
l'heure,
j'étais
au
Rallye,
un
rade
à
mi-chemin
entre
le
Brazza
et
le
Marigny.
J'ai
bu
un
coup
et
c'est
là
que
j'ai
re-eu
un
flash…
Voilà
pourquoi
je
suis
là
dans ce train.
Non
cette
fois
c'est
ma
tournée,
avant
la
fermeture
du
wagon-bar.
Le doigt de Dieu…
,
N’importe comment…
Di-e.top 8
=============
Dans
cette
histoire,
Dieu
est
décrit
comme
ayant
un
bonnet
noir
enfoncé
jusqu'aux
sourcils,
des
lunettes
montures
écaille,
un
nez
approximatif,
une
petite
bouche
telle
une
cicatrice
rosâtre,
un
parka
gris
foncé
ouvert
sur
un
tee-shirt
gris
ainsi
qu’une
l’écharpe
grise
pendant
de
chaque
côté
du
cou,
alors
que
dans
la
première
version
l’homme
du
wagon
bar
parlait
de
lui
comme
"d’un
homme
pour
le
moins
avachi
derrière
un
verre
de
bière"
sans
autres détails…
La
nuit
du
vendredi
18
au
samedi
19
janvier
2008,
l’auteur
de
cette
nouvelle
dit
à
sa
femme
:
«
Il
n'y
a
plus
de
métro,
je
raccompagne
ta
mère
chez
elle
en
voiture
et
je
reviens tout de suite. »
Sur
le
chemin
du
retour,
après
avoir
déposé
sa
belle-
mère
au
pied
de
son
immeuble,
il
passe
par
le
quartier
Latin, trouve une place libre boulevard saint Jacques…
Son
appareil
photo
numérique
à
la
main,
il
déambule
dans
les
rues,
photographiant
des
devantures
de
bars,
bistrots,
cafés,
de
nuit
en
se
disant
que
cela
pourrait
faire
des
images
pour
illustrer
l’histoire
de
l’homme
du
wagon
bar qui attendait Dieu dans ce type d'établissement.
2
h
01
42
:
Alors
qu’il
vient
de
prendre
en
photo
le
Buci
,
un
café
52
rue
Dauphine,
en
sort
un
individu
qui,
le
voyant
ouvert
à
l'écoute
lui
adresse
la
parole.
Au
bout
d’un
moment
l’homme
finit
par
l’inviter
à
prendre
un
pot
au
bar
juste en face du
"Buci"
, au
"Conti"
, 1 rue de Buci.
L’individu
n’en
est
visiblement
pas
à
sa
première
bière.
C’est
lorsqu’il
le
voit,
accoudé
au
bar,
devant
son
verre,
bonnet
noir
enfoncé
jusqu'aux
sourcils,
lunettes
monture
écaille,
le
nez
informe,
une
petite
bouche
telle
une
cicatrice
rosâtre,
le
parka
gris
foncé
ouvert
sur
un
tee-shirt
gris
et
l'écharpe
grise
qui
pend
de
chaque
côté,
que
l’auteur
a
un
déclic.
En
apparence
le
personnage
correspondait
parfaitement au Dieu dont parlait l’homme du wagon bar.
.
2
h
01
42
:
Je
viens
juste
de
prendre
en
photo
le
Buci,
un
café
52
rue
Dauphine, en sort un individu…
…il finit par m’inviter à prendre un
pot au bar juste en face, au Conti…
Di-e.top 9
2 h 48 44, il est en train de vanter les mérites de Paris…
«
Quelque
part
c’est
pas
mal,
parce
qu’ici
tout
peut
être
possible…
Ici
ça
peut
être
le
rêve.
Le
rêve
peut
durer
une
nuit
ici,
alors
qu’en
province
il
va
durer
combien
de
temps
?
Donc… Donc… »
«
Là
bas…,
dit-il
en
montrant
du
doigt
le
"Buci",
ils
ont
pas
voulu me servir, ils aiment pas les anarchistes. »
«
Il
y
a
un
grand
poète
qui
disait
:
"
Avant
de
te
connaître,
avant
d’arriver
à
toi
même,
perds-toi…
Il
faut
que
tu
sois
capable
de
te
perdre
pour
mieux
te
retrouver,
tu
vois
?
"
En
gros
ça
veut
dire
:
le
mec
qu’a
jamais
quitté
son
bled,
il
ne
pourra
jamais
mettre
des
étoiles
sur
les
clochers
de
son
église ou de sa mairie j’en sais rien… »
Suivent
des
propos
à
la
cohérence
incertaine.
«
…
Je
crois
pas
en
Dieu,
ni
aux
curés,
ni
aux
maires,
j’aime
pas
les
maires,
j’ai
horreur
des
maires,
c’est
la
race
que
j’aime
pas,
la
race…
Pourtant
c’est
la
race
des
travailleurs
mais
j’les
aime
pas,
ça
fait
longtemps
que
j’aurais
dû
ramener
leur
gueule
devant
l’État…
Les
maires,
c’est
des
hommes
de
paille…
Y
a
un
truc
que
j’aime
bien
dans
Paris,
si
tu
veux
les
petites
mafias
elles
peuvent
pas
exister,
elles
peuvent
pas
tenir,
impossible,
alors
qu’en
province
elles
pullulent,
elles
existent… »
Enfin
il
porte
sa
cigarette
à
sa
bouche.
Alors
qu’il
cherche
de
quoi
l’allumer,
le
papier
s’ouvre,
libérant
le
tabac
qui
tombe
d’un
bloc
à
terre.
Le
papier
vide
tient
encore
droit
dans
sa
bouche,
il
en
prend
conscience
en
allumant
son
briquet,
jette
le
papier
à
terre,
regarde
autour
de
lui,
et
s’adresse à un premier passant :
« T’as pas une cigarette ? » Sans succès.
«
En
gros
le
mec
qu’à
pas
quitté
son
bled
pourra
mal
se
défendre…
moi
je
me
rends
compte
de
plus
en
plus
:
putain
les acquis que j’ai ! Tous les acquis ! T’imagines tout
Di-e.top 11
ce
que
j’ai
ramassé
dans
la
rue
?
Tu
peux
pas
l’savoir…,
c’est un panier de crabes. »
2
h
53
mn
12
secondes,
alors
qu’il
dit
avoir
monté
une
association
à
Bourges
:
«
…
ils
m’ont
enculé…
J’leur
ai
dit
:
c’est
moi
l’Italien
qui
vient
du
Chinois
oh
lala
!
»,
il
repère
un
petit
groupe…
Il
va
vers
eux
pour
tenter
de
leur
soutirer
une cigarette.
«
S’il
te
plaît,
…
J’leur
ai
dit
:
c’est
moi
l’Italien
qui
vient
du Chinois… »
—
Des
Italiens,
des
Italiens
!
s’indigne
un
membre
du
groupe.
Il
ne
le
laisse
pas
continuer
et
dans
son
élan
se
met
à
déclamer :
« Une péniche de joie glisse sur mon lacrymal.
J'ai singé Attila pissant du haut d'son cheval ! »
—
Des
Italiens
sauf
que
nous
sommes
bretons,
rien
à
voir avec les Italiens ! reprend le membre du groupe.
— Vous êtes bretons, moi aussi !
— T’es d’où ?
— Quimper.
— C’est vrai ? ! Mavillon. Plöermel c’est par là…
— Non, Montparnasse évidemment.
— Moi, bien sûr j’suis breton, jusqu’au bout de la nuit.
— Moi j’suis Lorrain,
— OK on y va, jusqu’au bout de la nuit. Il rigole.
—
Jusqu’au
bout
d’la
nuit
quoi
!
Allez,
on
y
va.
Jusqu’au
bout de la nuit !
— On y va.
2
heures
56
minutes
55
secondes.
Le
petit
groupe
est
parti. Jusqu’au bout de la nuit.
Recherché
et
trouvé
le
texte
qui
commence
par
:
Une
péniche
de
joie
glisse
sur
mon
lacrymal.
J'ai
singé
Attila
pissant du haut d'son cheval !
.
…
Di-e.top 12
=============
Le texte qui se termine par : Suis-je un monstre de suie ?
Ne
serais-je
qu'un
songe
?
et
a
pour
titre
"Caricatures’’
d’Ange".
Di-e.top 13
=============
Il
était
une
fois
l’auteur
d’une
nouvelle
abracabrante,
"Nietzsche,
n’importe
comment",
laquelle
met
en
scène
un
personnage
qui
se
confie
à
un
voyageur,
dans
le
Wagon
bar
d’un
train
qui
roule
vers
la
capitale.
Il
lui
dit
les
circonstances
qui
l’on
amené
à
vivre
une
année
durant
en
"Total
Immersion"
dans
les
bars,
bistros
et
débits
de
boissons
à
la
recherche
de
Dieu.
Il
lui
raconte
sa
rencontre
avec
Lui.
À
la
fin
de
la
nouvelle,
le
lecteur
comprend
qu’ayant
perdu
contact
avec
Dieu,
il
part
une
fois
encore
à
sa recherche.
La
nuit
suivant
l’achèvement
de
la
nouvelle,
l’auteur
trouve
une
occasion
pour
aller
photographier
les
extérieurs
de
bars
et
bistros
avec
l’idée
de
peut
être
s’en
servir
pour
illustrer son récit.
Alors
qu’il
prend
un
ultime
cliché
d'enseigne
lumineuse
d'un
bar,
en
sort
un
homme
qu'on
a
refusé
de
servir.
L’homme
lui
adresse
la
parole
et
finit
par
l'inviter
à
prendre
un
verre
dans
le
bar
d'en
face,
sachant
qu'accompagné
il
a
moins
de
chance
d'être
refoulé.
À
un
moment,
voyant
l’individu
accoudé
au
zinc
l'auteur
a
un
flash
:
le
bonhomme
a
le
profil du Dieu de sa nouvelle.
C’est
le
destin
de
cet
auteur
qui,
entrant
de
plain-pied
dans
l’histoire
qu’il
avait
lui
même
ouverte,
se
retrouve,
personnage
parmi
les
autres,
piégé
en
son
sein
en
en
perdant tout contrôle.
C’est
l’histoire
d’un
auteur
mûr
pour
se
lancer
à
son
tour
dans
des
investigations
nocturnes
sans
fin
à
la
recherche,
sinon
de
Dieu,
sinon
du
personnage
qui
recherche
Dieu,
à
tout le moins de lui-même, jusqu’au bout de la nuit.
Di-e.top 14
=============
Di-e.top 15
Il
a
perdu
les
commandes,
il
n'a
plus
son
mot
à
dire,
prisonnier dans son histoire.
––
Ne sommes-nous pas tous prisonniers ?
–– Prisonnier de qui, de quoi ?
––
Quelqu’un
que
je
connais
vous
dirait,
prisonnier
d’une histoire ancestrale qui a la peau très dure. .
–– “Quelqu’un” ?
––
Il
s’agit
de
quelqu’un
qui,
à
la
suite
d’une
révélation,
a
développé
une
théorie
troublante,
susceptible
de
chambouler notre système de pensée.
–– A la suite d’une révélation.
–– Oui. Il a débusqué une incongruité sémantique..
–– Une incongruité sémantique ?
––
Une
incongruité
sémantique
surprenante
concernant
le cerveau.
–– Le cerveau de qui ?
–– Le cerveau.
–– Nos cerveaux à nous ?
––
Oui…
enfin
non.
La
personne
en
question
vous
dirait
que nous n’avons pas de cerveau.
–– C’est surprenant !
––
Et
que
l’homme
n’existe
pas,
en
tant
que
tel,
tout
du
moins.
––
Votre
bonhomme
est
un
original,
un
doux
dingue.
Un
illuminé ?
––
Il
a
été
touché
par
une
prompte
et
fulgurante
illumination.
Toute
ressemblance
de
certains
passages
de
ce
texte
avec
la
récente
découverte
de
la
disparition
de
deux
carnets
manuscrits de Darwin de la bibliothèque universitaire de Cambridge ne saurait être que fortuite.
*
L’HOMME EST UNE CHIMERE
Darwin : Guidado
–
– Vous m’intriguez.
––
Une
nuit,
à
la
radio,
un
professeur
de
médecine,
chercheur
de
renom,
parlait
de
personnes
ayant
perdu
l’usage
d’un
de
leurs
cinq
sens…
Mon
bonhomme,
comme
vous
dites,
sous
sa
couette,
écouteurs
dans
les
oreilles,
est
sur
le
point
de
s’endormir
lorsqu’il
est
rattrapé
in
extremis
par
cette
fin
de
phrase
:
«
…dans
de
telles
circonstances
a
lieu
une
autre
reconfiguration
de
notre
cerveau. »
–– Et alors ?
––
Jean-Claude
Ameisen,
le
chercheur
en
question,
disait la capacité de
notre cerveau
à se reconfigurer.
–– Et alors ?
––
Entendre
le
pronom
“notre”
accolé
à
“cerveau”
va
le
faire
réagir.
Une
véritable
incongruité
lui
saute
aux
yeux.
Pourquoi n’en a-t-il pas eu conscience plus tôt ?
–– En clair ?
––
Pour
exemple
:
vous.
Quand
vous
parlez,
là
maintenant, qui parle ?
–– Moi.
––
Vous,
qui
vous
?
Votre
bouche
?
La
langue,
la
glotte,
le grain de beauté que vous avez sur la jambe droite ?
Non
pas.
C’est
––
le
cerveau.
En
aucun
cas
votre
cerveau
mais
vous,
cerveau.
Nous
sommes
des
cerveaux
et
dire
“
notre
cerveau”
est
une
ineptie.
Les
cerveaux
n’ont
pas
de
cerveau.
–– Nous ne serions que des cerveaux ?
––
Pourquoi
que
!
Ce
qu’on
appelle
l’homme,
est
en
fait
une
chimère,
un
instrument
multifonctions,
perfectionné,
à
notre service, une marionnette?
un simple exosquelette
dont nous, cerveaux, tirons l’ensemble des ficelles.
–– L’homme une chimère, comme vous y allez !
––
Je
ne
fais
que
rapporter
les
propos
que
tient
la
personne en question. Pascal de son côté ne se posait-il
Di-e.top 16
pas
déjà
la
question
:
«
Quelle
chimère
est-ce
donc
que
l’homme ?».
Nous
nous
sommes
depuis
toujours
enfermés
dans
un
confortable
et
rassurant
conte
de
fées.
Parfaite
illusion.
Illusion parfaite.
Serrez
vos
deux
poings
Mettez
les
côte-à-côte.
Regardez
:
cerveau
droit
cerveau
gauche.
Nous
sommes,
au
mieux,
gros
comme
ça.
Au
mieux.
En
tout
cas
pas
plus
gros,
et
pour
arranger
la
chose
nous
sommes
gris-rose,
mous
et
gélatineux.
Etes-vous
prêt
à
vous
assumer
ainsi
?
Est-ce
moins
prestigieux,
moins
valorisant
qu’être
homme,
humain
ou
je
ne
sais
quelle
sympathique
et
dérisoire
invention
?
Nous
sommes
des
cerveaux,
pas
des
cerveaux
d’humains,
des
cerveaux
humains.
Le
cerveau
est
utilisateur du corps qu’il habite.
––
Pour
en
revenir
à
votre
bonhomme,
il
en
fait
quoi
de
son aberration sémantique ?
––
Il
va
s’apercevoir
que
cette
aberration
cachait
une
faille qui semble n’avoir jamais été explorée.
Une
faille
dans
cette
ancienne
histoire
à
la
peau
dure
dont je vous parlais.
Il
suffit
de
se
rendre
sur
l’Internet
pour
y
trouver
une
flopée
de
sites
où
il
est
question
du
cerveau.
On
y
apprend
comment
faire
travailler
son
cerveau…
On
y
trouve
toutes
sortes
de
recettes
pour
réveiller
son
cerveau,
pour
le
stimuler
par
la
méditation…
On
propose
:
Devenez
maître
de
votre
cerveau
…
Comment
l’entraîner
le
dynamiser
le
doper.
On
nous
explique
comment
libérer
et
muscler
notre
cerveau.
Comment
reprogrammer
son
cerveau.
On
y
trouve
des
phrases
comme
:
Le
cerveau
est
un
muscle,
il
faut l’entretenir régulièrement.
La
question
qui
se
pose
et
que
personne
n’a
l’idée
de
se
poser,
je
vous
la
vous
pose
:
‘’de
quel
outil
disposons
.
Di-e.top 17
nous
pour
agir
sur
‘notre’
cerveau,
pour
le
muscler
pour
le
rendre plus performant ?’’ Cherchez la réponse.
Toujours
sur
l’internet,
une
série
de
conférences
données
dans
le
cadre
d’une
“Croisière
de
la
connaissance”,
ayant
le
cerveau
pour
thème,
attire
l’attention
de
notre
bonhomme.
Participants
:
Albert
Jacquard,
Jean
Didier
Vincent,
Yves
Coppens
mais
aussi
Jean-Claude
Ameisen.
Notre
homme
va
écouter
très
attentivement
leurs
propos
en
espérant
y
trouver
ne
serait-
ce
qu’une
infime
allusion
à
cette
faille.
Espoir
déçu
:
le
débat
tournait
autour
du
fonctionnement
de
notre
cerveau
ainsi que de
celui
de nos lointains ancêtres.
Il
a
alors
la
curiosité
d’aller
chercher
du
côté
de
Darwin…
Le
constat
est
sans
appel
:
du
candidat
de
“Secret
Story”
annonçant:
«
Je
vais
faire
bosser
mon
cerveau
»
à
l’éminent
médecin
chercheur
qui
parle
de
la
faculté
de
notre
cerveau
à
se
reconfigurer,
en
passant
par
Darwin,
la
cécité
est
générale.
Le
cerveau
reste
toujours
servi
à
la
sauce
mon-ton-son-nos-vos-leurs
.
Intrigué
de
ne
trouver
aucune
voix
pour
relever
cette
incohérence,
il
décide
de
se
lancer
dans
l’exploration
de
cette faille qu’il a mis à jour.
–– Et que découvre-t-il ?
––
De
quoi
remettre
en
question
notre
vision
des
choses, radicalement.
–– Mais encore ?
––
Il
revisite
la
théorie
de
l’évolution
des
espèces
de
Darwin et aboutit à une théorie parallèle, compatible..
–– Rien que cela !
––
Il
lui
suffit
de
changer
un
paramètre.
Le
cerveau
est
mis
à
la
place
qui
lui
revient.
Dès
lors
la
théorie
prend
une
autre
tournure.
En
bref,
il
en
ressort
que
c’est
le
cerveau
qui,
jusqu’à
aujourd’hui,
pour
pouvoir
évoluer,
pousse
.
Di-e.top 18
lentement,
inexorablement
à
la
sophistication
de
son
logement
corporel
toujours
trop
étriquée.
Aujourd’hui
les
cerveaux rêvent d’homme augmentés.
––
Une
théorie
qui
pourrait
porter
le
nom
de
:
Théorie
de
l’évolution du cerveau des espèces.
––
Théorie
de
l’évolution
des
différentes
espèces
de
cerveaux
serait plus appropriée.
Il
démontre
que,
quoi
que
nous
fassions,
nous,
cerveaux,
fonctionnons en mode automatique intégral.
À
la
naissance
un
cerveau
démarre
avec
une
configuration
de
base,
un
programme
qui
va
s’enrichissant
au
cours
du
temps,
sans
cesse
sollicité,
mis
à
jour,
en
perpétuelle
reconfiguration
pour
employer
le
terme
de
J-C
Ameisen,
et
nos
actes,
nos
comportements
en
découlent
automatiquement.
Ce
sont
des
réflexes,
des
réflexes
d’une
complexité
infinie.
Nous
réagissons
à
la
nanoseconde,
au
coup
par
coup,
en
fonction
des
mises
à
jour
et
du
formatage de l’instant.
–– Et que faites-vous du libre arbitre ?
––
Moi
rien,
mais
pour
lui,
le
libre
arbitre
n’a
absolument
pas de sens.
–– Insinue-t-il que tout est écrit ?
––
Encore
faudrait-il
envisager
l’existence
d’un
“
Écriveur”
.
Et
sur
ce
point
il
est
catégorique.
Il
dit
qu’après
s’être
engouffré
dans
cette
faille
ignorée
et
en
avoir
inspecté
chaque
recoin,
«
Un
principe
créateur
eut-il
existé,
je
l’aurais
immanquablement
rencontré.»
Et
de
conclure
qu’il n’a trouvé aucune place pour un “Écriveur”.
––
En
clair
votre
bonhomme
dit
ouvertement
que
Dieu
n’existe pas pour la raison qu’il ne l’a pas rencontré.
––
Il
évite
de
dire
les
choses
de
la
sorte,
ayant
en
tête
ce
que Darwin écrivait dans un de ses carnets secrets.
–– Qu’écrivait-il ? ²
Di-e.top 19
Di-e.top 20
–– « Guidado »”
–– Guidado ?
––
“Sois
prudent
en
portugais.
Il
disait
aussi
:
«
Révéler
ses idées serait comme confesser un meurtre. »
Un
soir,
au
cours
d’un
dîner
en
petit
comité,
oubliant
cette
mise
en
garde,
notre
bonhomme
a
l’imprudence
d’évoquer
cette
histoire,
de
parler
de
preuve
irréfutable
de
la
non-existence
d’un
dieu,
et
de
faire
allusion
à
un
autre
carnet
secret.
Un
carnet
griffonné
dont
on
aurait
perdu
la
trace
où
Darwin,
sans
ambigüité,
aborderait
le
sujet.
Il
y
serait
question
de
vérité
pour
l’heure
inavouable,
d’un
temps
pour
chaque
chose,
de
futur
distant
où
la
lumière
sera
immanquablement
jetée
sur
l’origine
de
l’homme
et
sur son histoire.
––
Si
je
comprends
bien,
Darwin
passe
la
patate
chaude
aux générations suivantes.
––
Que
feriez-vous
?
––
Vous
êtes
face
à
un
vieil
ermite,
auriez-vous
le
courage
de
lui
annoncer
froidement,
preuves
à
l’appui,
que
Dieu,
à
qui
il
a
consacré
toute
sa
vie,
n’a
jamais existé ?
––
En
effet,
une
telle
révélation
avait
de
quoi
contrarier
beaucoup de monde.
––
C’est
peu
dire.
Contrariée
l’était,
dit-on,
la
femme
de
Samuel
de
Wilberforce,
évêque
de
Winchester
après
que
celui-ci
lui
eu
fait
part
en
1880
la
théorie
de
Darwin.
Elle
se
serait exclamée :
«
Oh
my
dear
!
Ainsi,
l’homme
descendrait
du
singe.
Let
us
hope
what
Mr
Darwin
says
is
not
true
,
pourvu
que
cela
ne
soit
pas
vrai
!
Mais
si
cela
devait
être
le
cas,
prions
pour
que ça ne se sache pas.
»
Pour
en
revenir
à
notre
bonhomme,
peu
après
ses
divulgations
au
cours
de
ce
dîner
les
ennuis
ont
commencé
et son domicile visité… Depuis lors il se sent menacé…
––
Il
s’est
mis
dans
de
sales
draps.
C’est
un
véritable
roman, dis donc ! Un Darwin code en puissance.
–– Un roman, vous n’en êtes pas loin.
Pour tout dire, je me suis mis dans de sales draps.
––
Là
je
ne
vous
suis
plus.
Que
venez-vous
faire
dans
cette galère ?.
––
Je
suis
en
plein
dedans.
Je
prends
le
risque
de
tout
vous
dire.
Depuis
un
certain
temps
je
travaille
sur
un
ouvrage
qui
traite
d’une
découverte
surprenante
au
sujet
du
cerveau
laquelle
m’a
mené
au
carnet
secret
de
Darwin,
ainsi
qu’à
la
preuve
de
la
non-existence
d’un
quelconque
créateur.
––
Je
comprends
pourquoi
vous
donniez
l’impression
de
très bien connaître votre bonhomme.
––
Peu
de
temps
après
en
avoir
parlé
lors
de
ce
diner,
mes
ennuis
ont
commencé.
Au
début
c’étaient
des
appels
et
des
courriers
inquiétants
et
ensuite
mon
domicile
qui
a
été visité...
–– Qui est derrière tout ça et pour quelle raison ?
––
Qui,
c’est
difficile
à
dire.
Peut-être
me
suspecte-t-on
de
détenir
des
documents
explosifs
capables
de
remettre
en question l’existence d’un quelconque Dieu.
––
Ils
ne
doivent
pas
faire
confiance
en
la
prière
comme
la
femme
de
l’évêque,
pour
recourir
à
ces
méthodes
peu
catholiques pour empêcher que ça ne s’ébruite.
––
Depuis
je
suis
obligé
de
me
méfier
de
tout.
Je
suis
sur
mes gardes.
–– Et sur l’existence du carnet secret “égaré” de Darwin ?
––
De
Darwin
on
connait
les
carnets
secrets,
son
carnet
B, son carnet rouge….
–– Et le carnet égaré, il est où ? Existe-t-il même ?
––
Je
ne
peux
rien
vous
dire.
Il
pourrait
exister,
ou
avoir
existé. Libre à vous de me croire ou pas. Libre à vous de
Di-e.top 21
penser
que,
peut-être,
je
suis
en
possession
d’une
copie,
d’un
double
de
ce
carnet.
Que
je
possède
des
documents
qui
pourraient
me
permettre
d’en
retrouver
la
trace
?
Si
tel
était
le
cas,
vu
la
situation,
il
serait
suicidaire
de
m’en
vanter.
Je
suis
piégé
et
pour
l’heure
je
dois
me
méfier
de
tout.
––
Vous
avez
déclenché
une
machine
infernale.
Vous
vous
retrouvez
à
peu
de
chose
près
dans
la
même
situation que cet auteur prisonnier de son histoire.
––
Une
histoire
qui
prend
une
allure
de
thriller,
une
sorte
de
Darwin
code,
comme
vous
dites,
dont
le
scénario
m’échapperait
.
J’ai
perdu
le
pouvoir
d’y
mettre
fin
et
quand
bien
même
essaierais-je
de
passer
outre,
ça
n’empêcherait pas l’histoire de suivre son cours.
––
Songeriez-vous
à
baisser
les
bras
?
Si
oui,
qu’allez-
vous devenir ?
–– Dieu seul le sait.
–– Vous avez le cœur à faire de l’humour ?
«
Sans
humour
la
vie
serait
une
erreur
»
me
répondit-il,
un
pâle
sourire
au
coin
des
lèvres,
«
L’humour
est
un
lubrifiant existentiel. »
Après
quoi
il
me
dit
:
«J’ai
tout
essayé.
J’avais
même
fait
parvenir
l’histoire
à
Cavanna
que
je
sais
curieux
en
science pour recueillir son avis sur la question. »
Et de me tendre un exemplaire de la lettre.
Il
s’agit
d’une
lettre
datée
du
15
juillet
2012
lui
demandant
expressément
de
consacrer
un
peu
de
son
temps à la lecture du récit joint.
–– Résultat ?
–– Sans réponse de part et d’autre.
–– De part et d’autre ?
––
J’avais
déposé
deux
exemplaires
du
texte
chez
un
éditeur
de
François
Cavanna,
un
pour
Cavanna,
l’autre
pour l’éditeur lequel avait promis de le lui faire parvenir.
Di-e.top 22
Di-e.top 23
Le
samedi
8
décembre
2021
je
me
suis
même
rendu
dans
une
librairie
du
quartier
latin
où
Cavanna
signait
son
dernier
livre.
Il
y
avait
du
monde
dans
la
librairie
du
quartier
latin, ce 8 décembre 2012, trop de monde…
–– Que vous inspire ce silence ?
––
En
partant
du
principe
que
le
texte
à
bien
été
lu,
ce
silence
pourrait
s’expliquer
par
une
cécité
cognitive
généralisée.
Connaissez-vous
le
syndrome
des
habits
de
l’empereur… ?
––
L’empereur
qui
se
promène
nu
devant
son
peuple
persuadé être somptueusement vêtu ?
––
En
l’occurence
le
peuple
est
atteint
d’une
cécité
bénigne,
réversible.
Quelques
mots
d’un
jeune
‘’simplet’’
suffiront
pour
lui
ouvrir
les
yeux.
Et
puis
il
y
a
cette
cécité
persistante
qui
touche
le
plus
grand
nombre
sans
qu’il
en
ait conscience.
–– Expliquez-vous.
––
À
la
naissance,
un
cerveau
qui
ne
serait
pas
stimulé
visuellement
pour
apprendre
à
voir,
passée
une
période
critique
de
cinq
six
ans,
est
aveugle.
Dans
le
cas
présent
il
suffit
que
quelques
connexions
seulement
n’aient
pas
été
établies
en
temps
et
en
heure
pour
que
s’installe
une
cécité
partielle
difficile
à
rattraper.
Alors
un
simplet
comme
moi
aura
beau
crier
«Ouvrez
les
yeux
!
»
malgré
toute
la
bonne
volonté
du
monde
les
yeux,
quoi
qu’ouverts,
ne
verront
rien.
Tout
se
passe
comme
si
vous
cherchiez
à
ouvrir
un
nouveau
logiciel
avec
un
système
d’exploitation
obsolète
et
que
ce
dernier
ne
le
reconnaisse
pas.
Nous
sommes
construits
sur
un
tel
système.
Bien
qu’imparfait
il
est
très
bien
rodé
et
tout
un
chacun,
religieux,
croyants,
athées,
agnostiques,
grands
esprits,
mécréants,
philosophes,
scientifiques…
s’en
accommode
depuis
toujours.
Partant
de
là,
ce
nouveau
logiciel
n’est
pas
prêt
à
être
reconnu,
.
Di-e.top 24
sinon
dans
un
‘futur
distant’
pour
paraphraser
Charles
Darwin...
––
Vous
semblez
bien
sûr
de
vous.
Vous
n’avez
pour
l’heure que le silence d’un éditeur et d’un auteur.
––
Vous
avez
raison,
ce
n’est
pas
suffisant
pour
en
tirer
des conclusions.
Il
me
dit
qu’après
Cavanna
il
a
cherché
à
obtenir
l’avis
du
neurobiologiste Jean Didier Vincent.
–– Pourquoi lui ?
–– À cause entre autre de Nénette…
==-==-==
NENETTE
Lettre à Jean Didier Vincent
Paris le 20 janvier 2013
Monsieur Jean Didier Vincent,
Le
12
juillet
2012
je
faisais
parvenir
à
François
Cavanna
une
nouvelle,
Guidado
!
Nietzsche
n’importe
comment,
lettre jointe.
Aujourd’hui
c’est
au
neurologue
que
je
me
permets
de
soumettre
le
texte
en
question,
allégé
de
sa
première
partie,
avec
l’espoir
que
vous
pourrez
trouver
le
temps
de
le lire.
Veuillez
agréer,
Monsieur,
l’expression
de
mes
sentiments respectueux.
Ci-joint un résumé de la première partie :
C’est
l’histoire
d’un
auteur
qui
se
lance
dans
l’écriture
d’une
nouvelle.
Le
sujet
:
––
un
personnage
qui,
ne
pouvant
se
faire
à
l’idée
que
Dieu
pourrait
être
mort,
décide
de
partir
à
sa
recherche.
Un
concours
de
circonstances
fait
que
l’auteur
de
la
nouvelle,
sans
s’en
rendre
compte,
en
arrive
à
devenir
un
personnage
de
son
histoire
et
par
là
même
en
perd les commandes…
P.S.
Pour
la
petite
histoire,
il
existe
un
point
commun
entre
vous
et
François
Cavanna
:
l’affection
que
vous
portez,
comme
moi
même,
à
ce
personnage
attachant
qu’est
Nénette.
Di-e.top 25
Ça
faisait
deux
mois
qu’il
avait
remis
les
documents
et
qu’il n’avait pas de nouvelle.
Je lui fait remarquer qu’ils auraient pu s’égarer.
––
Non,
ils
ont
été
déposés
à
même
la
boite
aux
lettres
de
son
domicile
parisien.
Je
pense
que
le
message
n’a
aucune
chance
d’être
entendu.
Sauf
à
croire
aux
miracles… Alors In chā' Allāh.
J’ai voulu savoir qui était cette Nénette
–– Nénette est une personne très attachante…
Je lui demande si elle avait été mise dans la confidence.
Il
me
répond
par
la
négative.
«
Nénette
est
pensionnaire
orang-outan de la ménagerie du Jardin des Plantes.»
Et
d’ajouter:
«Vous
pouvez
lui
écrire,
je
vous
laisse
entière
carte
blanche.»
Une
façon
de
me
faire
comprendre
qu’il
était prêt à me repasser la patate chaude.
Di-e.top 26
===
===
=
===
===
Di-e.top 27
NÉNETTE
Pour Nénette.
Chère Nénette,
Jacques
Roubaud,
mathématicien,
poète,
oulipien,
évoque
ce
double
mystère,
celui
de
pouvoir
comprendre
et
celui
de
ne
plus
vraiment
comprendre
comment
on
a
pu
ne
pas
comprendre une fois qu’on a compris
.
Ce
manuscrit
qui
vous
est
dédié
ouvre
la
porte
à
un
troisième
mystère,
celui
de
ne
pouvoir
comprendre
pourquoi
personne
n’est
en
capacité
de
vraiment
comprendre
ce
qu’on a pourtant été capable comprendre.
Celà
dit,
vous
pourriez
à
juste
titre
évoquer
cet
autre
mystère,
celui
tout
simplement
de
ne
pas
pouvoir
comprendre
pourquoi
on
n’arrive
pas
à
comprendre,
et
rappeler
ce
qu’écrivait
Darwin
dans
un
de
ses
carnets
:
«Celui
qui
comprendra
le
babouin
contribura
d’avantage
à
la
métaphysique
que
Locke»,
à
croire
que
vous
avez
tout
compris.
De tout coeur avec vous.
Il accepte que je le prenne en
photo. Il est 12 heures
12 minutes 5 secondes.
2
h
01
42
:
Je
viens
juste
de
prendre
en
photo
le
Buci,
un
café
52
rue
Dauphine, en sort un individu…
…il finit par m’inviter à prendre un
pot au bar juste en face, au Conti…
Chérie
je
descends
chercher
mes cigarettes au Marigny…
Pas plus tard que tout à l’heure j’étais au Rallye…
Le doigt de Dieu…
,
N’importe comment…
Il a un bonnet noir en foncé
jusquaux sourcils
Icononographie
Dieu n’existe pas, il nous enterrera tous
L’Homme est une chimère, pourvu que ça ne se sache pas !
didier.sribny@laposte.net
Une
découverte
qui
place
son
découvreur
devant
ce
double
mystère
qu’évoque
Jacques
Roubaud,
mathématicien,
poète,
oulipien,
celui
de
pouvoir
comprendre
et
celui
de
ne
plus
vraiment
comprendre
comment
on
a
pu
ne
pas
comprendre
une fois qu’on a compris.
Un
troisième
mystère,
celui
de
ne
pouvoir
comprendre
pourquoi
personne
n’est
en
capacité
de
vraiment
comprendre
ce
qu’on
a
pourtant
été
capable
de
comprendre
,
va
le
pousser
à
aller
plus
avant dans ses recherches.
Sur
les
traces
de
Darwin,
il
en
vient
à
développer
une
théorie
qui,
si
elle
venait
à
être
comprise,
devrait
troubler
sérieusement
l’ordre
régulier
et
stable
qui
rythme
depuis
toujours
notre
quotidien.
Une
théorie
qui
devrait
être
à
même
de
faire
bouger notre système de pensée.
Sur
un
coup
de
tête
un
homme
décide
de
partir
à
la
recherche de Dieu.
L’auteur,
en
retardant
le
moment
de
mettre
le
point
final
de
cette
histoire
abracadabrante,
va
finir
par
en
perdre
le
contrôle
et
se
retrouver
simple
personnage
d’une autre histoire.
Au commencement il y a ‘‘Dieu n’existe pas’’
Et puis
‘‘
L’Homme est une chimère’’
Les
germes
de
grandes
découvertes
flottent
constamment
autour
de
nous,
disait
Louis
Pasteur,
mais
ils
ne
prennent
racine
que
dans
des
esprits
bien
préparés à les recevoir
…
Note de présentation
Et Dieu dans tout ça…?
En
l’occurence,
les
germes
semblant
inexistants
et
les
esprits
peu
préparés
pour
recevoir
sa
découverte,
il
se
pourrait
qu’il
soit
le
germe
originel.
Position
pour
le moins inconfortable.
où il est question d’une découverte fondamentale,
un modèle de sérendipité
Il
est
question
d’une
incongruité
sémantique
qui
va
déboucher
sur
une
déconcertante
découverte
concernant le cerveau,
Avec,
par
ordre
d’apparition
:
Nietzsche
/
Gaston
Bachelard
/
Louis
Pasteur
/
Misha
Gromov
Nénette
/
Le
Bon
homme
/
Jean
Claude
Ameisen
/
Pascal
/
Albert
Jacquard
/
Yves
Coppens
Darwin / Samuel Wilberforce et son épouse / Cavana / Jean Didier Vincent.
Dieu n’existe pas
L’Homme est une chimère
suivi de
prions pour que ça ne se sache pas !
il nous enterrera tous
Di-e.top
Pour Nénette
DidierSribny.top